La mauvaise littérature est condamnée à l’oubli. Limitée aux seules œuvres
reconnues, notre connaissance de l’espace littéraire est de fait réduite à une
part infime de l’ensemble des œuvres. Le « bon goût » opère
inlassablement sa sélection parmi elles, malgré sa versatilité à travers
l’histoire et en dépit de l’instabilité du canon des grands textes tout comme
des institutions chargées de les transmettre. Sont ainsi implacablement rejetés
dans l’obscurité des textes de nature diverse : ouvrages ratés,
textes mercenaires ou illégitimes, écritures du dimanche, plagiats ou autres
impostures, mais aussi ce qui s’est trouvé recueilli sous la notion
problématique de paralittérature. Mais le « mauvais », ainsi refoulé
par le « bon goût », ne pourrait-il pas être semblable à cette
énergie noire, invisible mais fondamentale et prédominante dans
l’univers ?
L’espace littéraire fait coexister, à travers des systèmes de relations et
d’appréciations qui sont au fondement de ce colloque, la grande littérature,
avec son alignement de monuments consacrés, et une masse informe d’œuvres
oubliées ou méprisées. Pourtant, la première semble bien avoir besoin de la
seconde pour exister, s’en détacher comme sur une espèce de fond hétéroclite et
anonyme. Au-delà du rôle de faire-valoir qu’on ne saurait lui dénier, quelles
sont les fonctions de cette mauvaise littérature dans l’économie du système
littéraire ? Quant à notre jugement, qui se forme largement sur le
patrimoine accessible et élaboré avant nous, n’est-t-il pas en grande partie
déterminé par le jugement de nos devanciers ?
PISTES DE RÉFLEXION
La mauvaise littérature
- Les « mauvais genres » : pornographie, pulp, roman de gare, littérature de jeunesse, sentimentale, best-sellers, chick lit, etc.
- L’évolution des interdits et des mauvaises pratiques littéraires: plagiat, mystifications, nègres, testaments trahis, etc.
- L’étude de cas individuels : manuscrits refusés, auteurs maudits, épigones, fous littéraires, ouvrages ratés, reniés, mineurs...
Les fonctions de la mauvaise
littérature
- Les usages du mauvais dans les stratégies propres au champ littéraire : polémiques, critiques, rhétoriques, idéologiques, etc.
- Les fonctions du mauvais dans la formation du goût littéraire et l’apprentissage de l’écriture.
- Le mauvais comme justificatif et limite de la norme littéraire.
L’évaluation littéraire et la
valeur du mauvais
- Les lacunes et les oubliés des historiographies : discours/ littératures/ auteurs/ périodes disparus, bannis, ignorés dans les histoires littéraires.
- Revalorisation du mauvais : modification des valeurs littéraires, (re)découverte et (re)valorisation des « déchets littéraires », procédés de récupération par l’historiographie littéraire.
- Relation entre la mauvaise littérature, le canon et les institutions littéraires.
Les propositions, en anglais ou en français, limitées à 500 mots, sont à envoyer à l’adresse mauvaise.litterature@gmail.com avant le 30
septembre 2017.